À l'occasion de cette recherche, nous souhaitons mettre en regard une analyse théorique du partage et des expériences vécues. Nous voulons comprendre en quoi le partage peut influer positivement ou négativement sur les émotions ressenties au sein de la sphère domestique.
Nous nous focalisons plus précisément sur des situations de partage régulier et continu, autogéré, et étendu à un large nombre d'équipements. Nous nous intéressons donc à la cohabitation en tant qu'occurence existante et observable d'un tel partage.
Les expériences vécues sont récoltées à travers une série d'entretiens individuels, avec des personnes volontaires. Cette étude est donc focalisée sur des personnes qui pratiquent, ou ont récemment pratiqué, le partage d'équipement ménager à une fréquence quotidienne.
La recherche a débuté par une analyse théorique à laquelle a suivi une phase d'entretiens et de visites de lieux, dont le but était de confirmer, infirmer ou nuancer les conclusions de la phase précédente.
Type de cohabitations considérées. Nous nous sommes focalisés pour cette étude sur des lieux de vie autogérés, à l'exception de la visite d'un centre d'accueil de jour pour femmes à la rue 'La cité des Dames' géré au quotidien par l'association Armée du Salut.
Les visites et entretiens que nous avons effectués en personne ou par téléphone, concernent en tout dix lieux situés en zone urbaine, dont six sont situés en région parisienne, deux en région Auvergne-Rhône-Alpes, un en Bretagne, un en Alsace, un en Belgique et un au Brésil. Deux témoignages utilisés dans le podcast sont issus de courtes conférences retranscrites en vidéo (TedTalk) et concernent des cohabitations situées aux États-Unis.
Critère de sélection du panel. Les personnes interrogées sont des personnes qui partagent actuellement, ou qui ont eu plusieurs expériences récentes de partage d'équipement ménager. Dans le cas d'un des entretiens seulement, ce partage d'équipement ne se doublait pas du partage du lieu de vie.
Variations d'âge et de genre au sein du panel. Le panel de cohabitant·e·s interrogé·e·s est hétérogène en âge : six personnes interrogées ont entre 20 et 30 ans, les cinq autres personnes interrogées ont plus de 30 ans, et se répartissent uniformément de 30 à 90 ans. Le panel se constitue de sept femmes et six hommes.
Situations familiales et socio-économiques des témoignant·e·s. Huit des témoignant·e·s sont célibataires, un est en couple sans enfant, trois sont en couple avec enfant(s), et un est célibataire avec enfant(s).
L'ensemble des cohabitant·e·s sont des actifs ou jeunes actifs, employés et assimilés, et indépendants. Un témoignant est étudiant.
Idéologie politique et idéaux formulés par les participants. Le panel de cohabitant·e·s se définit majoritairement comme appartenant à une gauche politique.
Origine géographique des cohabitant·e·s et habitation d'enfance. Les cohabitant·e·s rencontré·e·s ont grandi dans diverses habitations individuelles (maisons, appartements, avec ou sans accès à l'extérieur) dans diverses régions de l'hexagone. Aucun·e d'entre eux·elles n'a grandi dans des cohabitations.
Conclusion. Le panel comporte des limites de représentativité, car il se compose majoritairement de jeunes actifs entre 20 et 30 ans, célibataires sans enfants, et politiquement orientés à gauche. Le premier critère de sélection des témoignant·e·s est également un frein pour la représentativité, car nous n'interrogeons que des personnes qui ont choisi un mode d'habitat partagé. En revanche, les raisons pour lesquelles ces personnes ont choisi ce mode d'habitat varient de la contrainte économique à l'envie de partager une vie quotidienne avec d'autres personnes.
La sélection des personnes interrogées étant basée sur l'accessibilité des contacts et le volontariat, nous ne pouvons pas conclure à notre échelle d'une quelconque préférence pour la cohabitation qui dépendrait du profil des personnes.
Déroulement. Neuf des douze entretiens ont été menés de manière individuelle, deux ont été menés en duo.
Cinq entretiens se sont déroulés directement sur le lieu de vie des personnes. Ils se composaient d'un temps de présentation générale de la personne, suivi par un temps de visite du lieu, accompagné de questions, et se terminaient sur un temps de questions plus générales sur le fonctionnement de la cohabitation et les aspirations personnelles de chacun·e·s. L'un des entretiens a eu lieu de manière plus informelle sous forme d'une discussion continue avec un duo de personnes (Cité des Dames). Les quatre entretiens restant, se sont déroulés sans visite du lieu, deux d'entre eux au téléphone (dont un pour lequel l'enregistrement n'a pas été possible : Claire), un dans un espace tiers (Chloé), et le dernier sur le lieu de vie mais dans un espace de réception uniquement (Marcelle et Jean-Jacques). Les entretiens menés duraient entre 45 et 90 minutes.
L'ensemble des habitant·e·s d'un même lieu n'étaient pas nécessairement inclus dans l'étude.
Thèmes abordés. Les entretiens ont été orientés majoritairement par les thèmes abordés par les cohabitant·e·s au cours de la visite. Mais des questions complémentaires étaient systématiquement posées en fin d'entretien, elles concernaient : le rapport de la personne à la consommation et à la propriété privée d'équipements ; la définition propre à chacun· e de l'intimité et la manière dont elle s'incarne dans le lieu de vie ; la définition des conforts et des inconforts de sa vie quotidienne ; les formes de solidarités et le rapport aux proches de la personne ; les types d'habitats envisagés par chacun·e pour un futur lointain ; les limites du partage en terme de nature et de nombre des co-partag·eur·euse·s selon le·a témoignant·e ; et la définition des limites au partage pour chacun·e en fonction de la nature des équipements et des lieux concernés.
Conclusion. Bien que le déroulement des entretiens ait pu varier quelque peu d'une personne à l'autre, la discussion autour de thèmes identifiés préalablement par la recherche théorique, a pu donner des points de comparaison entre les différents témoignages.